Ce matin

Pour ce début de semaine, je resors une histoire que j’ai écrit il y a quelques années.

«Ce matin, un lapin a tué un chasseur.»
Tel est le titre que je voyais en Une de mon journal habituel.


Mais en fait ce n’est pas aussi simple, alors je vais vous le compter, au moins essayer; alors installez vous confortablement, dépêchez vous de déballer votre bon bonbon, ca fait du bruit, ouvrez vos cornets de pop-corn, posez votre verre et surtout lâchez la télécommande, si si et même surtout la télécommande.

Ca y est vous êtes prêt(e)?

J’y étais et j’ai tout vu, tout bu, tout lu et j’ai décidé de vous dire comment cela s’est réellement passé.

Tout a commencé par un matin calme, un matin normal, il y avait encore un peu de rosée (très important le 2ème “e”, alcooliques…), le soleil pointait ses premiers rayons, et le vent (oui, c’est moi le vent, donc j’étais bien la) caressait légèrement l’herbe verte et tendre parsemé de petites fleurs blanches, oui blanche comme un rayon de la lune qui nous quitte à peine. Loin tout la bas, on devine le clocher du proche village, clocher tout simple comme on en voit partout, vers l’ouest, un petit bois, de chênes, bouleau et quelques sapins, non pas pour noël, dans cette paisible campagne, on ne fête pas noël, mais la est une autre histoire que je vous conterais peut-être si vous êtes sage.
Quelque part au sud, coule une paisible rivière ou plutôt un grand ruisseau que l’on entend murmurer tout doucement, comme s’il essayait de dire quelque chose; ne vous endormez pas tout de suite ce n’est pas encore commencé; On aimerait bien se rapprocher pour l’écouter, mais l’on ne peut, personne n’ a jamais vu ou ne sait ou est ce ruisseau. Les gens du village raconte à son propos une légende; ce ruisseau essaierait réellement de nous dire quelque chose, quelque chose qui nous concerne tous, peut être notre histoire, peut être notre avenir, nul ne le sait, seul un être au coeur pur peut le trouver et surtout le comprendre. Mais moi, le vent, je sais, j’ai vu le ruisseau, je sais ce qu’il veut nous dire mais je ne peux vous raconter, non personne ne doit jamais savoir.

Ca y est vous êtes bien entré dans le paysage, il est beau n’est-ce pas ?
C’était donc un matin calme. Calme, mais pas pour longtemps. En effet, j’entend déjà au loin des bruits curieux, des bruits qui se rapprochent lentement ; de plus en plus proche. Ca y est je les reconnais, il y a trois, quatre, non dix chiens qui ont l’air excités, ils courts dans tous les sens, ils font de plus en plus de bruits, il cherchent quelque choses, mais quoi, je ne le sais pas encore. Que vois-je d’autre plus loin? Des hommes ? Oui, c’est bien ca, des hommes, trois humains avec de drôles de bâtons. De drôles de bâtons que je ne reconnais que trop, oui c’est ce que je craignais, des bâtons de feu et les chiens qui ne sont plus seuls. Mais déjà, le silence, les oiseaux se sont tus, même la forêt ne dit plus rien, comme moi elle connaît le drame qui va se jouer et comme moi, elle ne pourras rien faire. Rien sinon attendre, attendre une fois de plus. Et déjà, ça commence, Pan, une fois, flapflapflapflap, une nuée d’oiseaux dans le ciel et rien. Ou sont-ils, ou vont-ils? PAN, PAN, PAN, flapflapflapflap, plein d’oiseaux tournoient un peu plus longtemps, ils se comptent, ils sont tous là, aujourd’hui ce ne seras pas pour eux que les hommes sont sortis. PAN, un lièvre détale en zigzag, comme il sait si bien le faire . Mais sait-il que c’est illusoire? PAN, tiens ! Un lièvre acrobate, comme si c’était le moment de faire le pitre! Un lièvre acrobate …, un chien s’en approche, il ne se sauve pas…, personne ne lui demanderas plus jamais de faire le pitre. PAN, PAN je n’ose regarder. PAN, PAN, pendant quelques heures et puis plus rien ? Non, il font simplement une pause, les hommes.
Oui, mais les lièvres, eux ne le savent pas, je les vois courir encore comme des fous ; Non pas par là, malheureux, ne vois tu pas ces hommes? PAN, trop tard !

Silence …

Un lièvre, court. Un lièvre avec une grande oreille blanche. Un lièvre? Oui, et il y a un homme qui dort, mais pourquoi l’herbe est-elle rouge autour de l’homme qui dort, et les autres qui s’agitent autour de lui, et les chiens qui hurlent? Au loin, un lièvre court, un lièvre avec une grande oreille blanche, mais pour combien de temps encore?

La forêt ne dit rien, elle n’a rien à dire, elle regarde et attend, elle aussi!

Aujourd’hui, dans mon journal sur la Une, «Ce matin, un lapin a tué un chasseur.»