Ami entends-tu

Pour Kaléïdoplumes, la consigne était la suivante :
Lieu: Une place de village
Personnages: des joueurs de pétanque
Action: une partie de pétanque
Incipit: Bon, alors! Tu vises? Ou tu pointes ?


« Bon, alors ! Tu vises ? Ou tu pointes ? »
Tous les samedis matin, la même phrase, inlassablement. « Tu vises ? Ou tu pointes ? » à la même heure, au même endroit, sur la même place.

Sans se préoccuper des badauds et autres passants, dans l’indifférence la plus totale, les mêmes mots, le même rituel.
C’est de Paul qu’ils se moquent, tout en sachant qu’il vise toujours à ce moment du jeu. Il les a tous regardé, Jacques, Alain, Sam et surtout Paulette, sa Mary. Tout ces copains qui préféraient l’appeler Paulette, parce que Mary n’était pas un nom assez français. C’est ainsi, ils se sont mariés puis habitués.
Ce jour là, pourtant, il a pointé … en plein dans le mille …
Il a pointé et il a vu … une image …
Une seule image qui l’a ramené des années plus tôt sur les champs quand un de ses copains percutait, comme ils disaient … Quand la guerre continuait à tuer après la fin, avec la paix, sur les bombes oubliées. Une dernière image et une petite chanson, le temps de rejoindre ses copains démineurs d’après-guerre. Il les a tous retrouvés, maintenant, le p’tit François, Paul son jumeau de patronyme, son frère, Jacques, pour une partie de pétanques autour d’une plaque avec leurs noms et une petite chanson …
« Ami, entends-tu le vol lourd des corbeaux sur la plaine … »